25/10/2024
2024 a été une année clé pour la RSE, la responsabilité sociétale (ou sociale) des entreprises.
Mais 2025 s'annonce différente.
Clé, aussi, car les Ressources Humaines des entreprises de toutes tailles, y compris les PME, ont intégré cette dimension de RSE au sein de leurs équipes, avec la création de postes de Responsables RSE, devenu presque un incontournable - et le plus souvent directement rattaché à la direction générale.
Clé, enfin, auprès des directions financières des entreprises qui ont pu lancer des démarches grâce à des dispositifs subventionnés, comme Pacte Industrie, Pacte PME ou encore Diag Décarbon’action.
2025 s’annonce toutefois différente. Les tendances de fond qui émergent démontrent la maturité du volet environnemental du sujet RSE, qui doit désormais aller plus loin pour s’inscrire dans la durée. 3 aspects en ressortent :
- l'impact environnemental au-delà du carbone
- l'adaptation au changement climatique comme un paradigme à intégrer au fonctionnement opérationnel et non plus seulement dans une logique de gestion des risques
- la charge de la preuve par les services RSE, pour pouvoir continuer et aller plus loin
Parler de l’empreinte environnementale davantage que de l’empreinte carbone
Le carbone n'est donc qu'une unité, très pratique. Mais il ne doit pas occulter une vision plus large : la biodiversité, les limites planétaires et le climat. L’eau, comme ressource ou risque d’aléa climatique, sera un enjeu majeur en 2025 et les épisodes climatiques extrêmes de 2024, comme les inondations récentes en Espagne et en France, ne font que nous le rappeler.
La biodiversité est également au cœur des enjeux, notamment pour les acteurs propriétaires de foncier. La loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages prévoit un renforcement de la séquence ERC (Éviter, Réduire, Compenser) en fixant un objectif d’absence de perte nette de biodiversité et la possibilité de non-autorisation de projets ne respectant pas la démarche.
Certains sont par ailleurs soumis à une évaluation environnementale obligatoire : une étude d’impact doit alors être réalisée, avec description de l’état initial de l’environnement et analyse des incidences du projet. On pourrait s’attendre à traiter en priorité les sites au score biodiversité dégradé ? C'est tout le contraire ! Afin d’optimiser l’efficacité des actions mises en œuvre à l’échelle d’une entreprise, il est recommandé de donner la priorité à la préservation d’une bonne biodiversité existante à la reconquête d’une biodiversité dégradée.
Transcription
La vision "tunnel carbone". La neutralité carbone : seul objectif ?
Crédit : Jan Konietzko / Traduction : Bon Pote
S'adapter pour (sur)vivre
L’adaptation au changement climatique est un sujet dont s’emparent les organisations. Mais la méthodologie d’une démarche d’adaptation va parfois à contre-courant des réflexes intuitifs d’un projet d’entreprise : peu de données d’entrée, transparence indispensable sur les moments où l’entreprise a failli. Le « circulez, y a rien à voir » ne peut être de mise quand on s’attaque au sujet de l’adaptation.
Contrairement au carbone, le point de départ d’une démarche d’adaptation au changement climatique n’est pas qu’une question de data. Sur ce sujet encore peu mature les données sont à aller chercher du côté de l’informel, en consultant les personnes sur le terrain. L’enjeu étant dès le début de récupérer tous les signaux faibles de ce qui s’est déjà passé et que seules les personnes sur site peuvent connaître. Par exemple : "pendant la canicule cette machine est tombée en panne", "cette salle doit être climatisée sinon l’IT tombe en rade", un parking inondé, des malaises de salariés, etc.
À partir de ces entretiens et de la cartographie de la chaîne de valeur, il est possible de déterminer où sont les enjeux, le niveau de vulnérabilité de la chaîne d’approvisionnement, les nœuds critiques ainsi que les éventuels éléments mis en place pour sécuriser ces nœuds (redondance, résilience). On peut faire ici le parallèle avec le Bilan Carbone®, pour lequel il convient de penser en logique de dépendance de l’entreprise, pour être certain d’intégrer toutes les dimensions d’empreinte dans le bilan.
Ce volet « adaptation » doit permettre de mettre en visibilité l’exposition et la vulnérabilité de l’entreprise aux aléas. Lorsque l’entreprise combine exposition et vulnérabilité aux aléas, le risque est constaté.
L’intérêt d’une démarche d’adaptation dans tout cela ? C’est cette capacité d’adaptation qui viendra pondérer la vulnérabilité de l’entreprise. En ces temps incertains et en considérant les records d’épisodes climatiques extrêmes en 2024, cette capacité sera un atout pour les entreprises qui auront amorcé le chantier de leur stratégie d’adaptation.
Pour aider les entreprises et territoires à passer à l’action, l’ADEME travaille sur les outils Open Source pour faire le diagnostic du territoire ; finalisation prévue en mars 2025. De nouvelles plateformes vont ainsi permettre de centraliser les ressources avec des dossiers thématiques, comme le Centre de ressources pour l’adaptation au changement climatique et la Plateforme Facili-Tacct (Trajectoires d’Adaptation au Changement Climatique des Territoires) pour aider les collectivités sur la précision de leur diagnostic, avec des données contextualisées (en open data).
Pour aller plus loin, la Fresque des vulnérabilités climatiques, inspirée de la Fresque du climat, permet de travailler les liens directs, indirects et les rétroactions. C’est encore un peu flou ? Nous en reparlerons !
Apporter la preuve des résultats
Par ailleurs, en 2021-2022, de nombreuses entreprises avaient lancé leurs premiers travaux de trajectoires de décarbonation. En 2025, elles devront vis-à-vis de l’interne pouvoir démontrer que les quick wins des premières feuilles de route de réduction de l’impact environnemental se réalisent, pour pouvoir continuer à se servir de la trajectoire comme boussole. À défaut, elles devront la mettre à jour pour s’assurer qu’elle soit pragmatique, réaliste et qu’elle intègre les enjeux d’adaptation et de ressources.
Enfin, l’année 2025, en raison du contexte politique, risque d’apporter son lot d’incertitudes sur le sujet du budget de ces projets liés au changement climatique et à la décarbonation.
Quelles subventions et quelles conditions de financement ? Les prochains mois nous apporteront des réponses en la matière.
L'autrice
Lucie Raty
Lucie est la co-fondatrice et Directrice Générale Déléguée d’Urbanomy.
Au sein de Veolia, de Dalkia puis de la Direction Internationale d’EDF, elle a mené de nombreuses missions en matière de Responsabilité Sociétale des Entreprises, de conduite du changement et de développement de nouvelles offres.
Lucie aime concilier les choses qui ne vont pas de soi afin d’accompagner la transformation des entreprises et des organisations du secteur public.